Home / Album - Balades / Week-end à la Grande Motte
Week-end à la Grande Motte

Par Semeac


La Grande Motte est située à environ 410Kms de Tarbes, 410kms d'autoroute essentiellement; il faut compter à peu près 4H en fonction de l'heure à laquelle vous traversez Toulouse, le seul point noir du trajet. Un autre petit souci, c'est qu'à partir de Narbonne l'autoroute est encombrée par les camions remontant d’Espagne telles des chenilles processionnaires occupant intégralement la bande de droite. C’est le même schéma que de l’autre côté entre Bayonne et Bordeaux. Vous avez dit qu’il y a crise ?

Un problème sur ce trajet, c'est que souvent le vent aime à jouer avec vous. Il vous attend près du littoral méditerranéen. Là est son pays, s’il ne vient pas de la terre il vient du large. Après la tramontane, le mistral. Le retour a été pénible et nous avons été bien secoués. Heureusement que l’autoroute avait 3 voies. Je pense qu’en pareille situation, une lourde masse lancée est un atout. La PC avec sa charge pondérale et ses formes lisses et son centre de gravité placé bas s’en sort relativement bien. On double 3 Harley forcément sénatoriales; ils nous font un salut furtif, sont-ils vraiment cools ? Les seules à tirer bénéfice de ce vent sont les éoliennes, dressées en ligne, leurs pales tournant paradoxalement mollement sous ce vent furieux, et bien sûr, les voiliers qui piaffent d'impatience face au large.


C’était ma première expérience de roulage avec la PC sur autoroute de nuit. Le phare éclaire comme les lanternes des diligences. Heureusement qu’on peut profiter des faisceaux des phares des voitures qu’on double. Mais dans les portions entre 2 pelotons, on se sent vraiment seul. Et on broie du noir.

C’est un pays d’eau. Quand vous roulez sur la bande de terre sablonneuse, elle miroite à gauche et clapote à droite. Marais et étangs d’un côté et mer de l’autre.

A faible vitesse, au ras des flots, les cheveux dans le vent, on s'y croirait...où?...La fraîcheur de mars vous ramène vite à la réalité. Cette étendue d'eau de faible profondeur change de couleurs en fonction du temps changeant. Aujourd'hui c'est vert-gris: mois de Mars, matin, vent moyen à fort, soleil voilé, température de l'air 8°C.

A l’époque de la création de la Grande Motte et bien avant sans doute, ils étaient déjà là, fouillant la vase à la recherche de crevettes qui leur donnent le rose de leur nom. Ils n'embêtent personne et personne ne songe à les embêter. Mais ils se tiennent quand même loin de la berge surtout si vous êtes à pied.

Bien sûr, il y a plein d’autres espèces ailées: mouettes, cormorans, sarcelles, hérons, grues, sternes, butors...mais ce sont les flamands que les touristes veulent voir. Est-ce que quelqu’un sait comment se fabrique le succès ?

Une pyramide sur le sable et en France, mondialement connue, mais une pyramide personnelle, naturellement inspirée par des visions de contrées lointaines. Une pyramide avec des côtés dissymétriques pour souligner la différence entre le levant et le couchant telle est l’œuvre de Jean Balladur.

C’était au temps du tourisme de masse, où il fallait installer tous ces nouveaux vacanciers avides d’eau salée et de soleil le temps d’un été, où il fallait endiguer la ruée estivale vers l’Espagne toute proche. D’un coin déshérité, oublié de tous, il a conçu une station balnéaire en rupture avec les canons issus du 19°siècle.

 

Pour s’y être promenés, on peut témoigner de cette impression d’innovation dans cette ville déjà vieille de 35 ans. Si certaines formes font un peu passées, le béton omniprésent pourtant ne lasse pas.

Le béton, matériau moderne de l'époque, qu'on essaie d'apprivoiser en masquant au maximun sa raideur,

par des courbes et des cercles, des splines avant l'heure. Tout est bon pour gommer la rectitude du béton banché, la linéarité des pensées, la ligne droite toute tracée.

Il faut effacer cette image désastreuse, qui lui colle à la chaux, héritée des méchants blockhaus. Ce n'est pas une église, c'est près du Point Zéro. Initialement le départ de toute chose mais qu'on a oublié.

Quand on voit tous les arbres dans et aux alentours de la ville, on a du mal à croire qu’il y a 35 ans, il n’y avait que des marécages au ras du sol, avec une ferme perdue au milieu, reliée à la société par un petit cordon de route.

Dans ce milieu bétonné, on a fait un effort pour garder un contact avec la nature en privilégiant espace et voies de circulation piétonnière. Ces lieux de flux sont bien sûr en béton, en grandes plaques trop espacées entre elles, pièges non dissimulés pour les fines roues des vélos, que les racines superficielles des pins s'amusent à soulever, jetant à terre les vieilles personnes en goguette.

On a dormi dans la 2° maison construite ici, perdue à l’époque, seulement cernée aux alentours par les engins de chantier traçant les routes et construisant le port. Il faut dire que les pionniers d’alors, achetant terrains et appartement sur plan, faisaient figure d’aventuriers.

Jean Balladur n’a pas conçu uniquement la grande pyramide mais l’ensemble de la Grande Motte. Chaque secteur, chaque recoin, n'ayant pour limites que celles de l'eau, sans grains de sable dans les rouages pour modeler tout ce qui repose sur cette lande de sable.

On est en bord de mer, cela s'entend aux cris des mouettes au réveil, au bruissement des aiguilles de pins, à l'odeur de la résine qui donne faim, le matin, lorsqu'on ouvre les fenêtres. 

Voyage à l'aller dans la nuit sans brouillard; voyage au retour au vent mauvais; intercom inutile; des bourdonnements encore dans les oreilles mais heureux qui comme Ulysse ...promène sa Pénélope.

Consommation de la PC: 7,48l/100Kms


Mis à jour le Samedi, 02 Juin 2012 18:00